Conseil national du Snes du 5 juin 2003


La détermination des personnels de l'Education ne se dément pas. Dans le second degré, plus de 3 000 établissements sont entrés tour à tour dans des grèves de longue durée, reconductibles ou tournantes. La force de la participation enseignante, a été l'un des traits marquants des grands rendez-vous sur les retraites (13 mai, 25 mai, 3 juin) et a fait de l'Education un thème majeur du débat public, au même titre que les retraites. Cette mobilisation, sans aucun précédent dans l'Education, se manifeste aussi par des participations croissantes aux grèves des journées de mobilisation à l'appel des fédérations de l'Education (22 mai, 27 mai, 3 juin) et par une multitude d'initiatives spectaculaires en direction des parents d'élèves, de l'opinion publique et des média. Le mouvement bénéficie d'ailleurs d'un appui impressionnant et nouveau de l'opinion publique (63% d'opinions favorable selon un sondage CSA).

Le gouvernement fait le choix aujourd'hui d'afficher une inflexibilité totale au plan des retraites tout en affichant, pour la toute première fois depuis 9 mois, un souci de dialogue dans l'Education. Ce souci s'est traduit après le conseil interministériel du 27 mai par l'annonce, le 2 juin, par N. Sarkozy et L. Ferry du report du dépôt du projet de loi sur la décentralisation de juillet à la 2ème quinzaine de Septembre pour permettre de relancer une discussion « sans tabou » sur le projet de loi. La demande des organisations syndicales d'une table ronde a été acceptée pour le 10 juin. Les ministres se sont engagés à y donner de premières réponses concrètes aux demandes des organisations syndicales. Le gouvernement n'a, par contre, pas cru devoir accéder à la demande de la FSU d'une accélération du calendrier que rendait pourtant particulièrement indispensable la proximité des dates du bac (12 juin pour l'écrit de philo).

Après une année scolaire d'actions de grèves répétées, plusieurs mois de grèves reconductibles qui ont impliqué des milliers d'établissements et des centaines de milliers de personnels, les attentes de la profession pour le 10 juin sont extrêmement fortes. Elle ne se contentera pas de mesures de détail ou d'aménagements de calendrier. Il s'agit, comme l'ont une fois de plus rappelé les fédérations de l'Education FAEN, FERC-CGT, FSU, SGEN-CFDT, UNSA Education, d'obtenir au plus vite les réponses concrètes sur les revendications exprimées par le mouvement :

- d'une part au plan de l'Education : priorité à l'éducation retrait du projet de loi sur les transferts de personnels MI-SE et aides-éducateurs

d'autre part au plan des retraites.

Le Snes attend en particulier des annonces et des engagements sur les points suivants :

Sur le dossier aides éducateurs et surveillance, maintien du statut de Mi-Se et restitution des 5 600 emplois supprimés au budget 2003 ; les missions de surveillance au sein des établissements de second degré doivent être réservées aux Mi-Se ; les missions remplies par les aides éducateurs doivent être assumées par des personnels relevant d'un autre statut de droit public qui ne peut être celui d'assistant d'éducation, ce qui suppose l'abrogation de la loi, et qui devrait donner des possibilités réelles d'accès aux étudiants.

Sur le dossier décentralisation, le Snes demande que soit retiré les volets formation et éducation du projet de loi sur la décentralisation qui avance des dispositions qui vont renforcer les phénomènes ségrégatifs : sectorisation des collèges, dispositions pour la formation professionnelle, transfert des missions et des personnels TOS, assistantes sociales, médecins scolaires et CoPsy dont le rôle, aujourd'hui centré essentiellement sur l'aide à l'élaboration du projet d'étude et d'avenir en formation initiale, serait profondément transformé .

Concernant l'autonomie des établissements, le Snes est opposé à tout accroissement de cette autonomie qui renforcerait les pressions extérieures, qui permettrait à l'Etat de se dégager de ses obligations en matière d'horaires d'enseignement et d'organisation non-ségrégative des études et qui renverrait des choix stratégiques à des instances restreintes au sein de l'établissement.

Sur le dossier budget, recrutements, remplacements et précarité, le Snes attend que soient réellement pourvus les 1800 postes affichés aux concours externes, que le plan de régularisation des « surnombres » soit abandonné, que des crédits et des HS soient transformés en emplois pour assurer les titularisations (3 000), que soit abrogé le recours aux vacataires et qu'il soit procédé à des prérecrutements dans les disciplines les plus sensibles.

S'agissant du dossier retraite, le Snes demande que soit retiré le plan Fillon que soit repris le débat et une négociation sur de tout autres bases. Le dispositif proposé est particulièrement pénalisant pour nos professions qui exigent de longues études, qui sont très féminisées et qui exigent un engagement personnel particulièrement intensif. L'allongement de la durée d'activité conjugué à l'effet de la décote, à l'indexation sur les prix, à l'abandon de la bonification par enfant et à la quasi suppression de la CPA, entraîne une dégradation extrêmement forte de la situation des futurs retraités alors même que la possibilité de racheter les années d'études est à la fois restrictive et prohibitive.

Pour les carrières, le Snes rappelle ses demandes d'amélioration des carrières et de réparation des injustices, de retour à l'actuelle CPA, d'allègement et de diversification des services en fin de carrière et de mobilité choisie.

Pour les conditions de travail, le Snes demande en priorité des mesures spécifiques de minoration des services et d'intégration dans le service de la concertation pour les établissements difficiles et par ailleurs un plan de résorption des effectifs pléthoriques (au-dessus de 30 au lycée, au-dessus de 26 au collège).

Sur l'ensemble de ces dossiers, rien ne sera gagné si la pression sur le gouvernement n'est pas maintenue à son maximum. Le Snes appelle donc à poursuivre la mobilisation dans toutes ses formes : poursuite des grèves reconductibles, initiatives spectaculaires, participation maximum aux journées de mobilisation. Cette mobilisation est absolument indispensable pour que des points importants soient marqués le 10 juin. Et, s'il faudra apprécier la situation au soir du 10, on ne peut exclure à priori que la mobilisation soit encore nécessaire au delà.
Sur le plan des retraites, l'élargissement interprofessionnel reste une condition indispensable à la réussite de l'action. Le 25 mai, puis la journée du 3 et les grèves reconductibles qui l'ont suivi dans de nombreux secteurs, l'implication croissante du privé ont marqué des étapes importantes dans ce sens. Le Snes avec la Fsu sera attentif à tout ce qui pourrait permettre de contribuer à élargir ce mouvement. La décision d'une nouvelle journée de grèves et de manifestation le 10 juin à l'appel de la CGT, de FO, de la FSU et de l'UNSA, à l'occasion de l'ouverture du débat parlementaire est une nouvelle étape dans cette démarche qui demande à être poursuivie.
Pour l'Education , les fédérations appellent à une nouvelle grande journée de mobilisation ce même 10 juin, marqué aussi par la table ronde au cours de laquelle sont prévues les nouvelles annonces gouvernementales. Le Snes propose que les fédérations de l'Education se réunissent aussitôt après la table ronde pour analyser la situation et décider des suites qui apparaîtront alors nécessaires. Le Snes soutient et appelle à réussir les initiatives interprofessionnelles du 12 juin dans les Bouches du Rhône, la Haute Garonne, etc.

C'est dans ce contexte que se pose la question des examens.

Les enseignants ont fait dans cette période de nombreuses démonstrations de leur esprit de responsabilité en multipliant sous des formes diverses les initiatives visant à ce que leurs élèves candidats aux examens soient le moins pénalisés possibles.

La perturbation de la préparation et les menaces qui pèsent sur le déroulement des examens et notamment du bac sont cependant bien réelles. Par sa totale surdité pendant des mois, par son refus de donner d'urgence des réponses aux questions posées, le gouvernement porte l'entière responsabilité de cette situation.

Le Snes s'est prononcé depuis des semaines contre toute forme de boycott des examens.
La majorité des personnels pense que ce serait injuste à l'égard des jeunes qui sont au cœur des préoccupations du mouvement ce serait réduire un mouvement dont la force a été de rassembler la profession à des démarches minoritaires ce serait ouvrir un véritable boulevard à tous ceux qui, notamment du côté du gouvernement, sont dans l'attente de la « faute » qui permettrait de retourner l'opinion publique contre le mouvement.
ce serait ouvrir la porte à des campagnes médiatiques dévastatrices
ce serait nous couper des parents d'élèves de la FCPE qui ont pour l'instant apporté tout leur soutien au mouvement de grève
ce serait aussi donner des arguments supplémentaires à tous ceux qui veulent remettre en cause le bac ou qui dénigrent le travail des personnels enseignants.

En même temps, le Snes continue à appeler à la grève, élément incontournable pour maintenir le rapport de force nécessaire avec le gouvernement. Il s'est donc prononcé pour que soit respecté le droit de grève dans toutes ses dimensions, ce qui concerne les cours, mais aussi les surveillances, les corrections, les participations aux différents conseils, commissions et jurys. L'objectif étant, non pas de bloquer l'examen, mais de permettre la poursuite de la grève, le Snes appelle les personnels grévistes à informer par des démarches les plus collectives possibles les responsables de l'organisation de l'examen. En ce qui concerne les surveillances, l'administration a tous les moyens de les faire assurer en ayant recours à des personnels non grévistes.Le Snes dénonce le choix fait par l'administration de requérir massivement les personnels. Le Snes apportera son appui aux collègues qui contesteraient l'utilisation abusive de ces procédures. Il appelle en même temps les personnels qui n'auraient pu se soustraire à la réquisition et les personnels non requis à utiliser toutes les possibilités de s'adresser aux candidats et aux familles sur les objectifs du mouvement (tracts, initiatives spectaculaires, ports de signes attestant la participation à la grève, etc.)

Les personnels sont aujourd'hui décidés à poursuivre leur action. Au gouvernement de mesurer leur détermination et d'annoncer le 10 juin les mesures susceptibles d'amorcer un retour à la sérénité dans les établissements scolaires. Le SNES mettra à disposition des personnels toutes les infos concernant la table ronde dès le 10 au soir. Il les appelle à se réunir en AG dès le 11 pour en discuter et débattre des suites de l'action. Il propose que les fédérations de l'Education se réunissent dès le 10 au soir pour procéder à une première évaluation des annonces gouvernementales. Au cas où le gouvernement persisterait dans son refus de retirer ses projets, le Snes propose, dès aujourd'hui, une nouvelle action de grève unitaire le 12 juin et la soumet à la Fsu et autres organisations syndicales de l'EN.


Motion adoptée par 60 POUR,18 CONTRE, 8 Abstentions

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